17 mars 2008

Accepter la régression


Nous vivons une époque formidable : le temps est venu de refondre nos systèmes informatiques !

Après des années de développement sur des terres vierges, les DSI actuels sont tous confrontés à une nouveauté : le remplacement des applications obsolètes.
Les programmes de refontes, pour se débarrasser des anciens systèmes devenus encombrants et moins ouverts que leurs potentiels successeurs, sont légions, et les techniques pour y aboutir sont tout aussi nombreuses.

Je ne compte plus les stratégies.

Le « big bang » : on passe d’une application à une autre en une nuit blanche après 3 ans de développement, ce qui aboutit le plus souvent à un gros bang : fin de la refonte, fin du DSI.
La « juxtaposition remplaçante » : le remplacement progressif, par exemple de trois applications par une autre, mais sans big bang, revient à créer une quatrième application qu’il faudra un jour remplacer.
Autre type de juxtaposition, le « décentrage » : on adresse avec la nouvelle application un processus nouveau, qui n’était pas couvert par l’ancien système (on n’a rien remplacé, mais on se congratule).
Le remplacement « technique iso-fonctionnel » : ça c’est merveilleux, la maîtrise d’ouvrage va payer des (dizaines de) millions pour avoir... la même chose qu’avant, mais en Java au lieu du COBOL (bel effort !).

Bref, je critique mais j’ai participé à chaque stratégie... Le point commun de l’ensemble de ces stratégies est qu’elles permettent d’éviter la régression, ce gros mot qui fait frémir les responsables informatiques.

Force est de constater qu’éviter la régression c’est éviter la refonte.

La culture de la régression est pourtant présente dans notre quotidien : changement de lunettes (aveuglement dangereux pendant une journée), changement de véhicule (freinage à réapprendre), changement de traiteur chinois (...).

La refonte informatique ne se passera pas sans régression, c’est une certitude, et c’est le seul élément à partager avec l’ensemble de l’entreprise, y compris les futurs utilisateurs. La régression s’explique par l’absence de documentation exhaustive de l’application à remplacer, par la présence d’habitudes ou de systèmes locaux qui contournent les défauts de l’existant, par une culture orale qui s’est dissipée avec le départ des concepteurs de l’époque.

Bref, la régression c’est naturel.

Alors prévoyez : la régression, partagée avec le métier, anticipée avec l'ensemble des acteurs, c’est la réussite de votre projet de refonte. Concentrez-vous sur les processus critiques (les vrais), ainsi que sur les apports nouveaux et les gains tangibles, apportés au métier par votre refonte (en dehors du Java ;-).
Et notamment : les nouvelles lunettes ont des verres ultra fins, le nouveau véhicule pollue moins, quant au traiteur chinois...